Immersion dans l’hiver

Depuis des mois, des bouts d’articles se pressent sous mes doigts. Des myriades de mots accoudés les uns aux autres, qui attendent sagement leur tour, et qui n’ont pour l’instant pas été publiés. Les idées ne manquent pas, les convictions non plus. Pourtant, de cette peuplade inaboutie, c’est la musique qui triomphe la première, avant la suite. 

Il m’aura fallu la sortie d’un album, la voix d’une femme pour me perdre dans les méandres de notes entremêlées de souvenirs, qui sur le coup semblèrent réels. La mémoire tactile, la mémoire olfactive, la mémoire visuelle amenées par celle auditive. L’empreinte du froid sur la peau, les joues brûlantes, et la chaleur d’un appartement. La douceur d’après-midis volées à l’hiver, aux tempêtes de neige s’abattant sur la ville.

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Montréal vu d’un studio de danse à l’Université Concordia – Mars 2017 – Louison Larbodie©

Nous voilà plongés au cœur de la période la plus ambivalente de Montréal. Mars et son temps changeant, porté par la voix rassurante de Charlotte Cardin, tantôt plaintive, tantôt emportée, et surtout séduisante. Cette voix que deux de mes acolytes récurrentes me firent découvrir quelques semaines avant, et qui a été la trame sonore parfaite de nos questionnements, nos ambitions et nos projets menés à l’envolée.
Danser de tout son soûl pour l’une, dessiner pour l’autre, et photographier ensemble. S’inventer modèle d’un jour, se laisser emporter par la folie d’un moment, d’un mouvement. Transformer la complexité de nos vies en un désordre jouissif, où nos humeurs changeantes pouvaient s’exprimer avec avidité.

L’album continue de défiler, et avec du recul traduit tant de phases de ces tempêtes intérieures menées au creux de nos appartements. Les titres se succèdent, et finissent par laisser place à une radio. C’est le timbre de Jean Leloup qui teinte alors la pièce et qui y dessine une autre atmosphère. Cette envie écorchée de créer, de vivre pleinement et sans concession, jusqu’à s’épuiser de nos excès. C’est une frénésie partagée qui nous a aidés à nous construire, à rire, à tenter, à se balancer entre plusieurs fils, et à sans cesse nous réinventer : couturières, interprètes, écrivaines, apprenties cinéastes. Tant de destins croisés en si peu de temps et d’espace. Tant de casquettes à enfiler et à enlever selon les envies.

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Un peu de lumière – Avril 2017 – Shan Sarasola©

Malgré son intensité, cette ville donne vie à tant d’ambitions, à tant de projets spontanés et à la créativité. Mais par dessus tout, avec son hiver mordant, Montréal c’est la solidarité entre toutes ces vies qui s’enrichissent mutuellement, pour se réchauffer dans cette ville en noir et blanc, au climat peu accueillant.

Finalement, c’est Charlebois qui aura le dernier mot, celui du réconfort : « Un jour je reviendrais à Montréal. »

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Le même réconfort que les chaussettes de Myriam et un rayon de soleil par -15°C – Mars 2017 – Louison Larbodie©

 

Se chercher dans un monde au masculin

Ce texte ne veut pas faire de mon cas une généralité, mais apporter un témoignage sur une des multiples réalités qui concernent la place des femmes dans une de nos sociétés.

I – Un petit récit personnel

Depuis ma tendre enfance, je sens qu’un truc cloche dans mes quêtes identitaires. J’aimais le rose, mais je voulais être rugbyman et faire de la boxe. Je chouinais quand je me faisais mal, mais j’aimais argumenter. Je ne comprenais pas pourquoi le masculin l’emportait sur le féminin, et de manière systématique je mettais elle/elles avant il/ils dans mes cahiers de conjugaison. J’aimais l’histoire, mais je manquais de repères féminins. Du coup, dès qu’une femme apparaissait au détour d’un commentaire d’un.e institutrice.eur, je me renseignais. Mais elles furent rares. En effet, les premières dont je me souviens sont Cléopâtre, Marie-Antoinette et Anne Frank. Trois destins tragiques.

En CM2, Olympe de Gouges s’est trouvée sur mon chemin. Un encart de deux minutes en classe, et un nom qui s’est ancré quelque part en moi, me poussant à continuer la quête de ces figures qui partageaient le même genre que moi.

D’un autre côté, j’ai eu la chance extrême d’évoluer dans un milieu « ouvert d’esprit », avec des parents qui m’ont transmis l’amour de l’art et qui ont laissé libre cours à ma curiosité et à mon imagination. Je suis passée par la période Disney et princesse, comme beaucoup de filles de mon âge, et j’ai voulu avoir un aspirateur en cadeau autour de mes cinq-six ans. Pourtant, je n’aimais pas que ma grand-mère me tire les cheveux à leur extrême en me faisant des queues de cheval parfaites, je n’aimais pas non plus qu’elle me fasse porter des robes de petites filles modèles, je voulais jouer au foot avec les autres garçons de ma famille et je rêvais de faire du skate, mais quelque chose m’en empêchait. J’étais la petite, fragile et qui doit faire attention. On m’interdisait d’être casse-cou indirectement, pas verbalement, mais on m’en dissuadait par le biais de comportements. Alors, je me suis sentie incapable de faire de l’escalade et de m’approprier mon corps et ses capacités pour agir comme je le voulais.

Yayoi Kusama©, vue de l’installation Infinity Mirror Room Castellane Gallery, New York, 1965.

Ainsi, on me socialisait à une certaine identité. L’art étant la composante essentielle me faisant vivre, je le prenais comme refuge. Et là, un autre problème est apparu qui m’a suivi jusqu’à l’adolescence. J’avais beau chercher à m’identifier à des femmes, je me retrouvais confronté à un monde majoritairement masculin. Si j’ai croisé le travail de Yayoi Kusama et celui de Fafi très tôt, il m’a fallu de nombreuses années avant de découvrir une multitude d’autres artistes féminines. Mes artistes préférés et donc mes modèles étaient quasi exclusivement masculins. Bowie me fascinait par son côté caméléon et androgyne. Gainsbourg a aussi eu une présence omniprésente dans mon évolution, tout comme les Beastie Boys,The Clash, Paul Kalkbrenner, les Stones ou AC/DC. Dans tous les domaines de la musique, mon premier amour, les femmes semblaient être exclues. Seul Ando Drom, Amy Winehouse et Ms. Dynamite semblaient m’offrir une alternative à tous ces hommes que je chérissais dans le ska, le rock et le punk.

Dans ma prime enfance, on ne m’a pas laissé m’encanailler pour longtemps avec les seuls contes stéréotypés. Ma mère me fit lire des livres illustrés par Rebecca Dautremer, me plongea allègrement dans l’univers d’Emmanuelle Houdart et les romans de Marie Desplechins dont je suis incapable de me séparer. Déjà, mon imaginaire se diversifiait. Les dessins animés et films d’animation que l’on me montrait n’y étaient pas pour rien. Hayao Miyazaki et ses personnages féminins ont ouvert l’encart de mon émancipation. Princesse Mononoké et Chihiro me permirent de faire preuve d’ambition. Même si ces exemples existaient ils étaient bien plus rares, et mon identité de femme se heurtait à de longues recherches identitaires en mal de modèles.

Illustration d’Emmanelle Houdart

L’école n’aidant pas, la littérature telle qu’enseignée ne jurait que par des auteurs masculins qui par ailleurs avaient aidé, en ce qui concerne Rousseau notamment, à dénigrer les femmes. Comment se retrouver là dedans ? Quelle place occuper dans nos sociétés ?
Ma mère, heureusement, m’offrait des romans de Colette et des bandes dessinées de Catherine Meurisse. Je m’intéressais au cas de George Sand/Aurore Dupin et compris que les femmes n’avaient pas atteint l’égalité contrairement à ce que l’on aimait me faire croire.

Quelques années plus tard, la philosophie me remplit de nouvelles désillusions. De petit « h » en petit « h », les femmes semblaient être les grandes oubliées de l’humanité, ce qui avait le don de m’énerver. Kant, je te dédie cette dernière phrase et mon déclic, car grâce à toi et à une professeure incroyable j’ai pu me nourrir d’un peu de Hannah Arendt et enfin oser ouvrir Simone de Beauvoir. Déjà, je me savais féministe.

II – Qui s’inscrit dans une réflexion plus large

Tout cela pour expliquer à tou.te.s ceux et celles qui parlent de la journée de LA femme, qui est devenue une fête et une ode à la consommation, qu’ils ne réalisent pas le chemin qu’il reste à faire dans la lutte féminine. Qu’ils ne connaissent même pas les vrais termes puisqu’il s’agit de la journée internationale des droits des femmes. Que LA femme n’est pas un tout, mais la moitié de l’humanité emplie de diversité, qui a une voix et une créativité hors norme qui ne demandent qu’à être diffusées. C’est une journée qui est censée sensibiliser sur les droits des femmes, et les enjeux qui leur sont liés. Je vous signalerais aussi qu’une journée internationale des hommes est célébrée le 19 novembre de chaque année. Son traitement social montre bien le fossé qui sépare encore femmes et hommes dans nos sociétés.

Encore faudrait-il que l’histoire des femmes soit enseignée, et que l’on arrête de nous raconter exclusivement celle des hommes. Si la taille du « h » a changé au fil des siècles, parler des « Hommes » n’est qu’une microconcession qui ne fait que grossièrement camoufler les inégalités de notre système de langage francophone, et qui fait semblant de ne plus exclure les femmes de l’Histoire.

Je suis née dans les années 1990, et j’ai dû me battre contre ma socialisation pour enfin m’affirmer, me trouver et être en phase avec mon « moi » profond longtemps refoulé. Pour y arriver, les sociétés ne nous la rendent pas facile. On nous fait comprendre qu’on a moins de crédibilité, que l’on est moins représentées, que l’on sera plus facilement discréditées et que pour arriver à des postes clefs il faudra passer par un vrai parcours du combattant. On n’hésitera pas non plus à nous faire croire que l’on sait ce qui est bon pour nous à notre place. On nous infantilisera et usera du paternalisme à notre égard au moins une fois, si ce n’est dix. Et ce, même dans l’industrie culturelle, celle dans laquelle je suis née et je veux évoluer.

Le mariage et les enfants sont encore une pression sociale importante exercée sur les femmes, leurs corps et leurs carrières. Pourtant, que l’on soit femme ou homme, cela doit être un choix et non un synonyme d’enfermement social et une norme que l’on s’impose sans vraiment la vouloir. Je déplore les difficultés qu’ont les femmes de trouver un emploi lorsqu’elles sont dans une tranche d’âge qui laisse sous-entendre qu’elles auront bientôt envie de procréer. Je déplore aussi les discriminations physiques que vivent les femmes. Le slut shaming, et toutes ces agressions quotidiennes qui empêchent nombre d’entre-nous d’exprimer leur être profond.

Si le progrès passe par les arts, encore faudrait-il que plus d’une femme ait remporté l’Oscar du meilleur réalisateur (et non réalisatrice, vu leur non-représentativité). Qu’on leur fasse une plus grande place. Qu’on ne les éloigne pas quand elles vieillissent parce que leur plastique n’est plus parfaite (heureusement que vous êtes là Meryl Strip, Catherine Deneuve et Whoopi Goldberg) et qu’on les laisse s’approprier leurs corps et leur sexualité (cf dernier discours de Madonna ou Jane Fonda). De plus, il faudrait que l’ont fasse connaître aux femmes les nombreux modèles qu’elles pourraient se choisir, de Patti Smith et Janis Joplin (les miens) à Vera Rubin en passant par Christiane Taubira. Elles existent, elles ont réussi à se faire une place dans de nombreux domaines, et les petites filles mériteraient de pouvoir s’identifier à elles et de trouver leurs voies en voyant qu’il est possible d’y aller.

Céline Bozon et Valérie Donzelli en plein tournage

Nous vivons dans un monde dominé par les hommes et dans lequel les hommes blancs cisgenres sont privilégiés. Les féminismes sont alors encore utiles tout comme la journée du 8 mars, qui permet à nombre d’entre nous d’élever la voix et de rappeler que féminisme n’est pas un gros mot. De rappeler que ce n’est pas non plus un tout homogène, avec une ligne directrice unique, mais un mouvement mouvant où tout le monde a sa place et qui est là pour faire avancer la lutte pour l’égalité. J’aimerai parler plus en profondeur des mouvements queer, du processus de déconstruction de sa socialisation, de la notion de genre, des privilèges, des droits LGBT et de l’intersectionnalité, car toutes les femmes ne vivent pas non plus la même réalité. Mais en tant que femme blanche je ne suis pas la mieux placée pour m’exprimer sur le dernier sujet, bien que je soutienne la lutte en cours.

Alors voilà, questionnez votre monde, et ne pensez pas que votre réalité est universelle. Pour vivre ensemble, il est nécessaire de faire l’effort de comprendre, d’écouter, de discuter et de se déconstruire pour mieux se reconstruire en dehors des carcans que nous impose la ligne directrice de notre société.

Ah et parce que je ne peux m’en empêcher, voici une petite playlist avec tout plein d’artistes féminines de renom (bon j’ai pas poussé jusqu’au mixage, production, manager, etc.)

 

Rêves sous insomnie 

Diurne sont mes nuits, nocturnes sont mes jours.
Abasourdie par l’insomnie, incapable de m’immerger dans le noir total, ma tête reste en suspends dans les étoiles, sans pouvoir y toucher, pouvant seulement les voir. Perdue dans cet espace sans fin, seul mon cœur invisible continue à se mouvoir dans un battement indicible.
Et, sans crier gare, enfin, elle apparaît.
Si proche et si loin, sa destinée ne tarde pas à m’émouvoir. Dépendant, ce satellite terrestre se meut pourtant dans son isolement.

Lune,

chimère empreinte de mystère,
qui nous éclaire
à l’instar de ces paillettes incandescentes à la chaleur lointaine.
Seulement, de leur feu mythique elles parent de misère
cette compagne de la terre,
lui enlevant le charisme et l’éclat de l’inconnue distance.

Sur cette sphère, reflet de lumière, l’humain a posé ses pieds, et là haut, ses yeux ébahis fantasmaient déjà sur ces poussières étincelantes, mortes ou vivantes, pour lesquelles il ne demanderait qu’à brûler ses ailes.

Dans mon univers , lune et étoiles se distinguent. Si les astres m’appellent, jamais je n’oublierai cette fascination première, voyage rêvé de Méliês, méritant toujours toute mon attention. Telle une vieille amie, elle restera un perchoir de ces soirées sans sommeil, autour duquel il est bon de graviter ou de s’asseoir.

 

Le mal du 21e siècle

Hier matin, après une courte nuit, le réveil fut difficile. Non pas à cause des nombreux shots ingurgités pour s’anesthésier, mais à cause de la nouvelle devenue réelle.
Désespérée, excédée, j’étais prête à renier certaines de mes valeurs en me commandant un uber quid de la société capitaliste ubérisée.

La peur au ventre, la rage au cœur mes idées s’embrouillaient pêle-mêle. Sous le coup des émotions, ma raison me faisait défaut, animée par un mauvais pressentiment dû à cette prise de pouvoir populiste. Brexit, Hongrie, coalition espagnole, Turquie, etc.¹ Tant d’éléments suivis de loin s’ajoutèrent à la débâcle nocturne.

Alors au moment de partir, un choix, aussi minuscule fût-il, changea mes perspectives. Prendre le bus et marcher, plutôt que de commander un uber. Marcher et observer le quotidien, ce quotidien dans lequel nous sommes enfermés qu’on le veuille ou non. Se canaliser, aérer ses neurones, et réfléchir.
Des bribes de cours d’histoire remontèrent à ma mémoire. D’un sentiment d’horreur exponentiel, je me suis mise à dresser des parallèles. L’histoire, bien qu’instrumentalisée,  devrait nous laisser certains enseignements.
Ce n’est pas la première fois que le populisme atteint le pouvoir démocratiquement, alors qu’il est tourné à la dérision. Pourquoi continuons nous alors à sous-estimer l’impact qu’il a sur une population marginalisée, peu écoutée et sous représentée ?
Nous vivons tous dans des vases clos. Dans des sphères qui se côtoient, pour ne pratiquement jamais se rencontrer. Le problème est peut-être là.

Nous discutons peu avec des personnes qui ont des avis divergents des autres. Et quand c’est le cas, nous préférons nous enfermer dans un dialogue voire un discours de sourds plutôt que de prendre sur soi pour écouter, et essayer de comprendre. Si l’on ne comprend pas, jamais nous ne pourrons endiguer certaines problématiques.

L’autre pierre angulaire à ne jamais délaisser est celle de la réflexion. Quitter le domaine des émotions et rationaliser. C’est le seul moyen de trouver des solutions, qui ne viendront jamais au détour de conversations stériles.
Pour cela, il ne faut pas oublier de se nourrir. Intellectuellement oui, mais aussi de celui que l’on rencontre. Chaque humain a son mot à dire, et du moment où on le réprime il se tourne vers celui qui enfin l’exprime. Parler pour essayer de contrer la radicalisation.

Rien ne se joue sur une seule élection si on le décide, en revanche tout peut se jouer sur l’inaction et la passivité. Alors peut-être qu’un autre des aspects à privilégier est l’engagement.

Celui-ci ne se cantonne pas à une seule forme. S’engager, c’est déjà décider de ne pas fermer les yeux. C’est décider de ne pas laisser gagner un parti dont on ne veut pas. Parfois en faisant preuve d’abnégation et en votant pour le moins pire. Ça fait mal, mais si on veut que les choses changent il faut justement faire en sorte de construire autre chose. C’est penser plus loin que ce vote, et continuer d’avoir espoir. Car sans espoir le monde avancera dans le noir, et il est certain que si orange is the new black, c’est loin d’être un idéal souhaitable au monde entier.
S’engager c’est aussi arrêter de se dire que le statu quo est inébranlable. C’est arrêter de se cacher ou de se réfugier dans le confort d’un canapé et face à un écran.
S’engager peut débuter dans l’ouverture d’un livre et continuer dans le soutien de médias indépendants. S’engager, c’est également faire l’effort de chercher. Si on ne se réfère qu’aux grands médias, il faut considérer que l’on n’est pas à l’abri de la « fabrique du consentement »², ce qui revient à dire de la construction d’une opinion publique appuyant la conservation de certains privilèges. Chercher son information, c’est s’ouvrir à une autre vision. C’est user de notre liberté d’expression et d’opinion.
C’est raisonner sur l’impossible.

Dans les temps violents que nous vivons, il faut essayer de prendre du recul quoiqu’il arrive, même lors d’attentats. Chercher à saisir le sens d’une telle action malgré l’envie de haïr et de pleurer. Si l’on ne cherche pas à voir les motivations, comment éviter la reproduction d’un tel schéma ?

S’engager c’est aussi arrêter de déshumaniser l’autre, qui est un autre nous bien qu’il soit extérieur à nous. L’humanité est un tout, sans distinction physiologique. L’humanité se pense, comme nos identités, la souveraineté de nos États ou ce qui nous effraie. La peur est un problème qu’il faut accepter pour le surmonter. La peur empêche de construire, détruit et fait souffrir, bien qu’elle soit nécessaire pour survivre.

Les émotions nous rendent humains, faisons en sorte qu’elles ne détruisent pas l’humanité. Nous avons la chance d’être doté d’un cerveau, servons nous-en.

 

¹Pieiller, Evelyne. « Le beau Danube noir ». Le Monde Diplomatique. Novembre 2016, p.22-23.
² À ce sujet : Stauber, John, Rampton, Sheldon. « Art de l’arnaque et science de la propagande ». Chap. 2 In L’Industrie du Mensonge. Relations publiques, lobbying et démocratie. Agone : 2012. Première parution 1995. 432 p.
Le chapitre 2 résume assez bien le sens de la fabrique du consentement. Sinon lire Manufacturing Consent, d’Herman et Chomsky ou voir le documentaire d’Achbar et Wintonick sur Chomsky datant de 1992. Ou se renseigner sur Walter Lippman et Edward Berneys.

 

Tolérance sur fond noir

2002, cours préparatoire et apprentissage de la calligraphie sur les bancs d’une école de quartier. 2002 et la découverte de la politique dans la rue. 2002, c’est Chirac contre Le Pen et mes premières manifestations, mes premiers gros mots autorisés et la découverte de concepts.
J’entends souvent chez moi No racism, No sexism, et j’observe alentour la peur des lendemains. Surtout j’écoute Porcherie des Béruriers Noirs. Porcherie ou un titre qui ne m’a pas quittée. Fier représentant de mon espoir contre mon cynisme, et cette tristesse de le réécouter si souvent pour trouver la force de continuer à espérer et à croire en la rébellion, en la liberté de pensée et d’esprit de nos sociétés.

2003, le groupe joue aux Transmusicales de Rennes et les albums tournent quand en 2006 un voyage et un premier iPod me font écouter sans répit l’Empereur Tomato Ketchup, Salut à toi et Petit Agité que je braillais dans les oreilles de mon petit cousin pour l’embêter. De quoi continuer à éveiller mes instincts mordants et mon envie de changement.
Puis à Paris, dévorant encore les Bérus au petit-déj et entrant au collège, on m’offre des vinyles collectors de ces artistes mythiques dans une bulle d’aficionados.
Depuis, les Bérus reviennent, mais renvoient inexorablement à cette construction intrinsèque et expliquent sûrement ce qui bout dans mes veines. Les Bérus seront toujours quelque part dans mes gènes.

Les recettes au pif de Louison #4 : le brunch de l’été indien

Grâce à une symphonie de travaux matinaux, vous vous réveillez à 8 h 30 du matin après avoir fêté la veille. Vos idées ont du mal à se mettre en place… Que se passe-t-il ? Où êtes-vous ? Qui a pris l’agréable décision d’écouter des chansons paillardes sous votre fenêtre en cette heure matinale ? Après un rapide coup d’œil à votre fenêtre vous maudissez l’énorme camion qui ronronne et qui crache ces sonorités horripilantes.
Vous essayez de vous rendormir, en vain… Parce que c’est là que votre estomac prend le relais est qu’il lance un appel de détresse.

La faim vous tiraille, mais vous avez envie d’autre chose qu’une poignée de granola, ou que le fameux diptyque pain beurre ?

On est sur la même longueur d’onde et pour calmer vos pulsions dévastatrices, voici une proposition de brunch pour profiter de l’été indien…

LES INGRÉDIENTS :

Ils nourrissent à peu près deux personnes fatiguées qui ont vraiment le goût de manger.

1. Crème de citron sur son lit de granola (en gros tarte au citron et pâte au flocon d’avoine) :

Crème de citron :

– Un œuf
– Un citron et son zeste
– Une grosse cuillère à soupe de farine
– Sucre ou sirop d’érable trois cuillères à soupe, ou un peu plus
– Beurre, environ deux cuillères à soupe

Pâte de granola :

– Un œuf
– Deux cuillères à soupe de farine
– Un filet de lait
– Une cuillère à soupe de miel
– De six à huit cuillères à soupe de flocons d’avoine, le mélange doit être compact

Conseil : pour ma part j’ai pris un mélange de flocons d’avoine aux pommes, à la cannelle et au miel, et ça a très bien marché. Si vos flocons d’avoine ne sont pas sucrés, ajoutez un peu plus de miel.

2. Crumble de tomates au pain ou pain perdu Tatin à la tomate

– Trois tomates
– Une gousse d’ail
– Un demi-oignon
– Basilic
– Un tiers de baguette qui a durci
– Miel ou sirop d’érable
– Cumin
– Sel, poivre

3. Le croissant déjeuné et végé :

Le croissant :

– Un croissant. Vous pensiez sincèrement que j’allais vous en donner la recette ? N’oubliez pas qu’il est 9 h du matin (faut bien 30 minutes pour se décider à passer aux fourneaux) et vous êtes affamés. Alors, sortez en acheter, c’est plus sûr.

Garniture :

– Fromage de chèvre
– Ciboulette
– Salade

LA PLAYLIST :

Comme le titre l’indique, je vous parle du brunch de l’été indien. Du coup, comme vous êtes quand même encore un peu sur le party dans votre tête, vous avez un relent d’envie de danser qui vous monte aux gambettes.

LES RECETTES :

Bon même si de mon point de vue la partie la plus importante d’une recette au pif est le moment où l’on mange, avoir la recette c’est quand même indispensable pis c’est chouette pour le côté créatif et la montée du désir.

Photo par Myriam Bernet ©

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1. La crème de citron sur son lit de granola

a. La crème de citron

Dans un bol, mélangez du beurre préalablement fondu, un œuf, le zeste, la pulpe et le jus d’un citron, le sirop d’érable et la farine. Placez une minute aux micro-ondes à puissance maximale. Sortez et mélangez. Répétez l’opération jusqu’à atteindre les trois minutes de cuisson. Mettez de côté le temps de préparer le b, et de préchauffer le four à 200° C.

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b. Le lit de granola

Dans un autre bol, fouettez l’œuf avec du lait. Ajoutez le miel et continuez. Ensuite, incorporez progressivement la farine au mélange, puis les flocons d’avoine. Assurez-vous que le résultat soit assez compact. Si cela vous semble trop liquide, rajoutez des flocons d’avoine.
Beurrez un moule conçu pour faire six muffins. Répartissez de manière équivalente chacune des portions avec votre « lit de granola », puis y coucher par dessus votre crème de citron. Enfournez une dizaine de minutes.

Photo par Myriam Bernet©

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2. Crumble de tomates au pain ou pain perdu Tatin à la tomate

Coupez vos tomates, hachez votre ail et votre oignon. Ciselez le basilic. Dans un plat allant au four, répartissez vos ingrédients de manière homogène. Versez dessus du sirop d’érable ou du miel, du cumin, du sel et du poivre.
Coupez de tout petits morceaux de pain. Les placer par dessus.

Une dizaine de minute et censée s’être écoulée. Sortez votre crème de […] vous connaissez la suite, laissez-la refroidir, tandis que le crumble cuit toujours à 200 °C pour une quinzaine de minutes.

Photo par Myriam Bernet ©

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3. Le croissant déjeuné et végé :

Rien de plus easy. Coupez votre croissant de manière à ce que vous puissiez l’ouvrir en deux d’un côté et que la pâte ne soit pas sectionnée de l’autre. Tartinez-le de fromage de chèvre frais (c’est le mieux) que vous ornez ensuite de ciboulette et de salade. Mettez au four deux-trois minutes histoire que ce soit tiède.

Bon il est presque 10 h 30, vous avez la patate parce que votre coéquipier. e qui ne cuisine pas, mais qui mange (et qui est allé. e chercher les croissants) vous a bien faite marrer. Vous avez repris le goût du mouvement, mais vous avez grave la dalle. La bonne nouvelle c’est que c’est prêêêêêêêêêêt. Ne vous reste plus que le dressage fancy et à passer à table !

Photo par Myriam Bernet ©

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Bon’ app, et je vous dis à bientôt pour une nouvelle madeleine et sûrement pour une réflexion au tour du végétarisme, et si le cœur m’en dit autour de la bouffe au ciné. En attendant mangez du blow up (arte) pour les cinéphages, puis bon courage à ceux qui ont repris les cours, le travail ou le train train.

Sinon toujours sur les réseaux (notedelouison sur insta) et dans l’écriture/autre pour maze.fr

Photo par Myriam Bernet©

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Soirées et maux de crâne québécois

Je l’ai découvert pendant une nuit chaude en Abitibi (région du Québec ndl). Ce charisme et cette énergie ne m’ont pas laissé insensible. Pourtant je ne pensais pas que le FME allait me faire découvrir un gars comme lui, ce Louis-Jean Cormier déjà adulé par beaucoup. Le FME allait être une expérience en soi, marqué par tant de nouveautés, de bonheur et de nostalgie.  Je n’imaginais juste pas qu’il allait en devenir l’incarnation. Qu’il allait coller à mes basques après m’avoir offert ce petit frisson en interprétant « Tout le monde en même temps. »

Je n’imaginais pas m’enfourner sa voix dans les tympans à chaque période de down. À chaque fois que je me déçois, que j’ai besoin de solitude ou qu’un cycle montréalais se ferme. Je ne me doutais pas que de cette première fois découleraient tant de derniers instants. Tant de moments échappés dans les airs de la vie, tant de présents trop vite renvoyés au passé. Louis-Jean Cormier c’est ce sentiment de liberté et de bonheur si vite dissipés. De ceux que l’on aimerait garder précieusement au creux de sa main pour y replonger quand ça va moins bien.
C’est cet étrange malheur teinté d’espoir qui nous dit que de ce passé regretté surgiront bien des lendemains. Et ce sont ces lendemains qui deviendront ce passé à l’amertume délectable.

« La Fanfare » me renvoie à l’image d’un lac rosi par le soleil se dissipant. C’est la vision de bières dans le frigo d’un hôtel, le goût du redbull et la sensation de cette chaleur humide typique du Québec à partir de la fin mai.

C’est l’envie d’y croire, d’aimer et de rêver. C’est aussi le paradoxe de cette insouciance évaporée et de certaines histoires avortées avant même d’avoir pu commencer.
Louis-Jean Cormier c’est Montréal et les difficultés qu’apporte le fait de grandir. Ce sont ces allées sur lesquelles se dressent des barrières à sauter. Ce sont ces succès et ces chutes, ces moments d’entre-deux.
Louis-Jean Cormier c’est l’ivresse de l’éthanol et le mal de tête qui paraît interminable du lendemain. C’est la soirée, mais aussi la gueule de bois.

Les recettes au pif de Louison #3 : l’apéro

Bon faut pas se leurrer, été n’est pas synonyme de diète et rime encore moins bien avec régime. En revanche quand il s’agit de fêter, l’été pointe le bout de son nez. Tout comme pour les festivals, le fameux party estival. Avec un peu d’honnêteté, la vie sous le soleil (si vous êtes dans l’hémisphère nord) c’est plutôt boulot, vélo, apéro et dodo que son expression plus dépressive de l’hiver le fameux – et je vous laisse le penser en chœur – métro, boulot, dodo. Malheureusement l’automne arrive à grands pas (bon même s’il reste une semaine on est en été) et il est donc temps pour moi de me livrer à mon exercice de style favori, la recette au pif! Et pour l’occasion quoi de mieux que d’inviter quelques potos rigolos pour concocter un mets pas si compliqué (bon faudrait en reparler après quelque verres de l’alcool au jasmin de ma grand-mère) : l’apéro.

LES INGRÉDIENTS :

Toutes les proportions données approximativement permettent de nourrir amplement quatre adultes et demi.

1. Le remix Tzatziki/Raïta

– Un concombre
– La moitié d’un pot de yaourt de chèvre (environ 250 mL) voire plus selon la taille de votre concombre
– Jus de citron, et un soupçon de vinaigre balsamique pour un acide plus sucré
– Sel, poivre, cumin, curry
– Ciboulette et même soyons fous de la menthe si vous en avez

2. Les poivrons marinés

– Poivrons rouges
– Ail
– Graines de patiences (comme dirait ma mamie, encore elle)

3. La compotée de tomate

– Deux petites tomates
– Une gousse d’ail
– Un peu d’oignon
– Huile d’olive
– Sel, poivre, cumin, paprika, cumin (au cas où y en ait pas assez), piment moulu

4. Carotte et sa date (prononcé dayte, dire rdv) nommée petite sauce

– Trois carottes

Pour la sauce :
– Moutarde
– Huile
– Vinaigre balsamique
– Sel, poivre de céleri
– Herbes de Provence
– Et même un soupçon de miel (le mieux c’est celui de ma mamie, désolée je sais pas ce que j’ai aujourd’hui)

5. La vedette de l’apéro le sombre héros Guacamole

– Trois avocats
– Vinaigre balsamique et/ou citron
– Un demi-oignon
– Piment moulu, cumin, curry, gingembre en poudre, paprika
– Coriandre
-Sel, poivre

6. Le Bloody Hell Mary selon My

– Vodka (optionnel, puisque pour les enfants le mocktail marche aussi)
– Jus de tomate
– Jus de citron
– Sel de céleri
– Tabasco
– Glaçons

7. La playlist

Une fois n’est pas coutume, comme le repas se décline comme le latin voici la fameuse playlist qui vous permettra de préparer les victuailles. Autant vous dire qu’elle est éclectique, à l’image des âges et des personnes présentent pour cuisiner cette soirée-là.  Petite indication, c’est un enfant de six ans (ma sœur) qui a sélectionné le premier morceau, donc pas de jugement.

LES RECETTES :

1. Le premier mets préparé est un remix du Raïta et du Tzatziki parce que finalement pourquoi choisir entre les deux ?

Commencez par éplucher le concombre. Ensuite, râpez-le  grossièrement et laissez-le dégorger une vingtaine de minutes dans un bol avec une pincée de sel (c’est plus efficace). En attendant, vous pouvez débuter une autre recette.
Enlevez l’eau, versez le yaourt, le jus de citron, le soupçon de vinaigre, le sel, le poivre, les épices et les herbes dans le récipient. Mélangez et goûtez régulièrement pour réajuster l’assaisonnement.

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2. Poivrons marinés

Pour les poivrons marinés, vaut mieux si prendre la veille. C’est pas que c’est long, mais on doit la laisser mariner cette affaire-là, et pas une heure ou deux, mais une nuit au moins.
Quand vous vous sentez de vous lancer, prenez autant de poivrons rouges que vous en voulez. Faites-les cuire sur du papier sulfurisé dans un four préchauffé à 180 °C ou 200 °C pour une durée indéterminée. Enfin pas tout à fait, retournez les poivrons régulièrement et lorsque leur peau est gondolée de manière homogène retirez-du four.
Ensuite,
laissez-les reposer dans un sac plastique qui facilitera leur épluchage. L’étape suivante coule donc de source. Retirez la peau de vos poivrons, et coupez-les en lanière.
Hachez votre ail, et placez les deux ingrédients dans un récipient se fermant. Ajoutez-y un filet d’huile d’olive, du sel et du poivre. Le frigidaire étant votre meilleur ami, laissez votre préparation y passer la nuit.

3. Compotée de tomates

Rien de plus simple qu’une compotée de tomate. Coupez les tomates en dés, ajoutez la gousse d’ail hachée, l’huile et les épices avant de mettre la préparation au frais le temps de terminer le reste.

Avant de passer au vrai 4 l’inverser avec le 6 et boire un petit verre, pour se placer dans une ambiance festive.

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4. Carotte et sa date nommée petite sauce

C’est simple comme bonjour, coupez les carottes en lamelles, et préparez la sauce. Pour vous faciliter la vie, prenez un petit pot en verre (ce qui change du petit pot de beurre que ma mère vous envoie). Mettez-y une bonne cuillère de moutarde, un peu de miel, le vinaigre, le sel, le poivre et les herbes de Provence. Laissez macérer quelques instants, puis ajoutez l’huile. Fermez le pot et secouez énergiquement.

5. La vedette de l’apéro, le sombre héros Guacamole

Dénoyautez vos avocats, les écraser. Coupez finement votre demi-oignon. Mélangez avocats et oignon. Ensuite, cisaillez votre coriandre et versez-la dans le plat. En faire de même avec les épices, vinaigre, sel et poivre. Goûtez et rectifiez vos proportions jusqu’à ce que ça vous plaise.

6. Bloody Hell Mary

LA RECETTE qui fait le tout (bon j’exagère peut-être un peu…). C’est ma commis-amie Myriam, qui m’a donné les petits conseils supplémentaires que je vais vous proposer. C’est bien un bon drink, mais s’il est beau on régale les pupilles en plus des papilles. Et pour arriver à ce résultat, commencez par la décoration du verre. Dans une assiette, faites un mélange de sel de céleri avec du poivre. Coupez un quart de citron, placez-le sur la bordure de votre verre et faites-en le tour. avant de le retourner et de le tremper dans la mixture.

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Passons maintenant aux choses sérieuses. Mettez les glaçons dans votre verre, puis deux-trois bouchons de vodka, quelques gouttes de tabasco selon vos attentes, le jus de tomate, mélangez le tout et ajoutez du sel de céleri.

Et voilà c’est prêêêêêêêt! Vous avez de quoi boire, manger et puis surtout de quoi danser et fêter ! Sur ce je vous dis à la prochaine madeleine musicale, qui est pour… bientôt ;)

N’hésitez pas à me suivre sur instagram en attendant : @notedelouison c’est moi.

Un quotidien emporté par le vent

En relisant Nick Hornby et les premières pages de son 31 songs, une phrase m’a stoppée nette : « quand on aime une chanson, quand on l’aime assez pour la laisser nous accompagner tout au long des différentes étapes de notre vie, la répétition gomme tout souvenir spécifique. »
Il est vrai que la répétition ne laisse aucune place à la précision. Comment se souvenir de chaque instant où ses notes et ses mots nous ont bercés ou animés? Les nouvelles technologies, les services de streaming, la dématérialisation de l’objet ont rendu d’autant plus naturelle cette répétition pour la pousser à son paroxysme. Il est aujourd’hui encore plus aisé d’épancher sa soif de musique, de subvenir à ses pulsions extrêmes, à son musicomanisme de cette substance enivrante. Y revenir n’aura jamais été aussi facile et pourtant… Pourtant, des artistes, des albums et des chansons bien que réécoutées à outrance ramènent à des instants, à des moments comme leur découverte ou un évènement marquant.
Certes, ces fragments sonores n’y sont pas les uniques ports d’attache, mais des balises auditives au pouvoir de remémoration tout aussi puissant qu’un goût ou une odeur. Si une atmosphère peut renvoyer l’espace d’un instant dans un lieu précis, la musique aussi.
Pour cette raison, mes lettres choisiront régulièrement au gré de l’envie et du moment, des morceaux qui ont marqué de manière durable ma vie et qui risquent encore d’y laisser une empreinte pérenne.

Le vent nous portera, premier lien avec ce Noir Désir qui reste tatoué dans mes gènes. Un bruissement me suffit à reconnaître cette pièce de mon enfance si souvent jouée à la maison. Jeune, poreuse à chaque découverte, l’aspect redondant de l’écoute évoque chez moi l’odeur du plancher, la froideur du carrelage de cette grande salle divisée en deux, et le canapé recouvert d’un tissu léopard. Mes parents si jeunes, et surtout ce salon qui me paraît si grand. Puis la chaîne hi-fi et les caisses de disques. Ma mère qui chantonne, puis mon père qui m’explique que c’est un groupe qui l’a marqué, lui qui est bordelais. L’histoire et les images se répètent, un quotidien emporté par ce vent…
Puis un jour, c’est le drame dans mes montagnes. Cette voix si appréciée est à l’origine d’un acte qui me glace le sang… et pourtant la musique reste, subsiste et ne peut s’empêcher de continuer son chemin dans mon quotidien.

Le temps passe, les goûts changent, mais Noir Désir ne trépasse. D’autres titres se font une place. L’homme pressé lui aussi entendu depuis des années marque un de mes étés au bord de l’eau et la rage de l’adolescence. À l’envers À l’endroit et ce constat, cette mélancolie et ce mal inextricable que le groupe expie. Ce mal matérialisé dans l’immatériel.

Cette tristesse et l’ennui de la campagne en plein été. Le paradoxe de la beauté de cet ennui qui éveille la curiosité, et favorise la lecture.
Noir Désir réveille tellement de lieux et de couleurs. Le vert tendre de l’herbe dans laquelle se mire le soleil; le bruit des abeilles et l’odeur de terre humidifiée par la rosée. Les balades tardives et la douceur des habitudes passées.
Et Marlène en 2012 qui synthétise ces années. Marlène et ces cœurs qui saignent, Marlène et cette urgence.

Mais au final, que reste-t-il? Cette envie irrépressible d’être envoyée dans ce Bordeaux effervescent d’un début des années 1990 fantasmé. D’un monde passé où Bertrand Cantat n’était connu que pour sa musique, et dans lequel les squattes culturels vivaient leurs meilleurs moments.
Noir Désir, c’est une époque terminée où le rock en français avait la place d’exister. Où la colère grondait sous la plume de certains auteurs, où la rage s’accordait à la vigueur des instruments, où l’on s’exprimait par le biais de cette poésie chantée et maintenant datée.
Noir Désir est un souvenir qui a encore de beaux jours dans les abysses de ma mémoire, et la porte ouverte à ma nostalgie.

 

Écouter la fin d’une session

Que l’on aime ou non ses études, la fin de session est toujours un passage obligé qui a des effets non désirés sur le quotidien. Manger à des heures diverses et variés. Boire des litres de café, de thé et même de redbull une fois la nuit tombée. Visiter bibliothèques, appartements et autres endroits fermés pour se donner l’impression de bouger, de sortir et de s’aérer. Puis se trouver des diversions et des raisons à la procrastination. Pour ma part, mon esprit s’est naturellement décidé à passer une heure à la création d’une playlist sensée aider à réviser, chercher et écrire. Je vous la partage donc, peut être y trouverez vous votre compte !

En attendant, solidarité et courage !